Image
Près de Reims, une quinzaine d’usines et de laboratoires mutualisent matières premières, eau, énergie, effluents, et même R&D. Une économie de ressources prometteuse pour rendre les usines plus propres.

Ecologie industrielle : quand les usines fonctionnent en symbiose

21 oct. 2017 - 2 min

Près de Reims, une quinzaine d’usines et de laboratoires mutualisent matières premières, eau, énergie, effluents, et même R&D. Une économie de ressources prometteuse pour rendre les usines plus propres.

« L’union fait la force » pourrait être la devise des entreprises du complexe agro-industriel des Sohettes. Sur ce site de 160 hectares installé au nord de Reims, une quinzaine d’usines et de centres de recherche cohabitent : une sucrerie (Cristal Union), une distillerie d’éthanol (Cristanol), une fabrique de glucose (Chamtor), un laboratoire de recherche d’ingrédients cosmétiques (Soliance Givaudan), un laboratoire spécialisé dans la valorisation non alimentaire des agro-ressources (A.R.D.), ou encore une usine-pilote qui vise à développer un procédé de production de biocarburant de deuxième génération, qui n’utilise pas la partie comestible de la plante (projet Futurol Procéthol 2G).

Chaque arrivée crée des synergies

Leur point commun ? Tous utilisent une matière première agricole, dont notamment la betterave et le blé. « La sucrerie est installée sur le site depuis 1953, explique Michel Mangion, directeur RSE chez Cristal Union. À partir du moment où la distillerie a ouvert ses portes en 2006, les installations se sont enchaînées. Cela s’est fait de manière intelligente, les directions de chaque entité essayant de créer des synergies avec les nouveaux arrivants. » Aujourd’hui, plusieurs dizaines de connexions relient les différents acteurs. Par exemple, la distillerie utilise les résidus de blé issus de la fabrique de glucose pour fabriquer son éthanol. Tout comme les laboratoires de recherche et développement présents sur le site.

Ce modèle d’écologie industrielle et territoriale va dans le sens de la société. Il permet de répondre à toutes les préoccupations actuelles : optimisation de la production, mais aussi utilisation de matières premières agricoles et réduction de l’empreinte carbone… D’un modèle basé sur les ressources fossiles, il permet de faire émerger une nouvelle économie efficiente et fondée sur le cercle vertueux du recyclage et du développement durable.

Michel Mangion, directeur RSE de Cristal Union

Une économie circulaire de l’eau

L’eau, dont les usines ont besoin en grande quantité, est également mutualisée. « Nous avons imaginé une véritable économie circulaire autour de l’eau », commente Michel Mangion. La vapeur produite par la sucrerie peut être directement envoyée, via un réseau de conduits, vers la distillerie et la fabrique d’amidon pour entrer dans le process de fabrication. Autre exemple, l’eau est utilisée plusieurs fois par les différentes sociétés, passant si besoin par des stations de traitement mises en place par les partenaires. Et lorsque le liquide devient trop chargé en matière organique, il est acheminé vers des terres agricoles grâce à un réseau de distribution, pour irriguer les terres.

Cerise sur le gâteau, le dioxyde de carbone ( CO2) produit par la distillerie n’est pas rejeté dans l’atmosphère. Installé sur le site, un atelier d’Air Liquide capture le gaz carbonique, puis le purifie et le liquéfie, afin qu’il puisse être réutilisé par exemple par l’industrie agro- alimentaire. Un luxe, que chaque entreprise n’aurait pas pu s’offrir individuellement. Produits, eau, vapeur, infrastructures... le travail d’équipe profite à tous, autant d’un point de vue économique qu’écologique. « Ce modèle d’écologie industrielle et territoriale va dans le sens de la société, se réjouit Michel Mangion. Il permet de répondre à toutes les préoccupations actuelles : optimisation de la production, mais aussi retour aux champs matières premières agricoles et réduction de l’empreinte carbone... D’un modèle basé sur les ressources fossiles, il permet de faire émerger une nouvelle économie efficiente et fondée sur le cercle vertueux du recyclage et du développement durable. »

Un complexe sous contrôle

Les entreprises des Sohettes mutualisent aussi leur bureau de contrôle. Depuis 2000, Bureau Veritas a ainsi accompagné 5 chantiers sur 11 du complexe, en tant que coordonnateur en matière de sécurité et de protection de la santé (CSPS). De plus, ses contrôleurs sont présents tout au long de l’année pour des missions de contrôle technique, d’animation sécurité ou des actions spécifiques. « Nous avons créé des fiches de données de sécurité pour certains produits, mesuré l’épaisseur des cuves de plusieurs usines, accompagné la mise en conformité de machines », éclaire Jérémy Davesne, chef de projet chez Bureau Veritas Construction.


69 initiatives en France, dans tous les secteurs

L’écologie industrielle et territoriale (EIT) est loin de se limiter à l’agro-alimentaire. Sur les 69 démarches d’EIT répertoriées par l’association Orée, une majorité relève d’autres secteurs. Entre Lyon et Grenoble, la plateforme chimique Les Roches-Roussillon mutualise équipements et services, et propose une valorisation commune des déchets. Sur les plateformes portuaires de Gennevilliers ou de Bonneuil- sur-Marne, en région parisienne, plusieurs industriels du BTP partagent les conteneurs ou expérimentent des déchetteries uviales. En Charente-Maritime, le réseau Biotop regroupe 95 PME de tous secteurs d’activité, qui échangent des produits et mettent en commun leur collecte de déchets.

« La création de ces cycles de réutilisation fait sens d’un point de vue économique et favorise l’ancrage des entreprises dans un territoire car elles sont intégrées dans un réseau », a expliqué Suren Erkman, professeur d’écologie industrielle à l’université de Lausanne (Suisse), à la Tribune de Genève. Un point de vue partagé par les pouvoirs publics. Depuis 2013, les conseils régionaux et les directions régionales de l’Ademe accompagnent les groupements d’entreprises souhaitant se lancer dans une démarche d’EIT (animation, études, aides financières...). Tandis que le programme national de synergies interentreprises (PNSI) vise à mettre en relation des entreprises souhaitant se lancer dans une logique d’économie circulaire lors d’ateliers participatifs.
 

 

Besoin d'une information ?

Cliquez-ici